« Aimer, à perdre la raison… Aimer à n’en savoir que dire… » Vous connaissez sans doute ces vers d’Aragon décrivant à merveille l’état de passion amoureuse.
Les débuts d’une histoire, quand notre cœur bat à tout rompre, quand on analyse chaque mot dans les textos de l’être aimé (et qu’on soupèse soigneusement chaque mot de notre réponse). Quant on met des heures à choisir des vêtements. Quand on tombe en pâmoison devant deux pigeons qui roucoulent etc… Une période bénie – en fait – où l’on ressemble étrangement à un tournesol, entièrement dirigé vers les rayons de notre nouveau Soleil. A ce moment-là… hum… comment dire… pas de grande différence entre un drogué et nous ! Le monde extérieur nous intéresse moyennement, les conversations nous ennuient, à moins qu’elles ne concernent l’Élu et nos activités perdent leur sens. Un état de passion, étudié par scientifiques et poètes de tout poil. Un état de créativité extrême, un peu hors du temps. Un état aussi dont il est bon de sortir, après quelques mois, de peur de se perdre complètement.
Dans la période de passion amoureuse, on recherche la fusion. Ceci pourrait d’ailleurs ressembler à une quête mystique. Mais la différence avec cette dernière est sans doute pour l’amoureux passionné une soif tellurique, gigantesque, irrépressible d’être en présence de l’autre. Une soif bien décrite dans le bouddhisme comme la source de toute la souffrance humaine. Cette soif, tournée vers l’extérieur, emporte l’être « en dehors », comme un tourbillon. La passion mystique – ou quête spirituelle – l’aspire vers une intériorité céleste, dont la première étape sera le retour à soi, tel quel sans artifice.